Guanlei a des allures de villes de bout du monde, elle ressemble à une ville de frontière au Mexique… à ceci près qu’elle est entourée de forêt tropicale et que personne ne parle espagnol…
Une seule grande artère… qui mène au port, et derrière le bâtiment des douanes et 40 mètres derrière le fleuve, c’est le Myanmar.
On se dirige donc vers le port. C’est ici qu’il faut demander, trouver la capitainerie et négocier deux petites places sur un cargo.
Bien sûr, personne ne parle anglais.
Mais on nous dit que c’est possible, et qu’il faut aller voir le capitaine d’un bateau et voir avec lui directement… ce que nous partons faire.
Il y a quatre énormes camions remplis de gros sacs (de graines de tournesol) qui sont en train d’être vidés dans les cales des bateaux. Et une quinzaine de petites fourmis humaines qui, une à une, portent ces énormes sacs.
On explique à un mec qu’on veut aller en Thaïlande, et qu’on veut y aller en bateau.
Pffff… pas facile de se comprendre. Bon, il nous dit que le bateau va bien en Thaïlande, mais finalement qu’il n’y va plus, bref : qu’on ne peut pas y aller avec lui.
On remonte un peu plus haut, et nous arrivons aux baraques de la capitainerie.
On leur demande si des bateaux vont en Thaïlande, oui oui, mais installez-vous, on allait déjeuner !
Nous, on est sympa, on s’installe et nous prenons un bol de riz. Le mec passe deux trois coups de fil et nous dit qu’il y a bien un bateau qui y va… puis finalement que c’est mieux d’y aller en bus par le Laos.
… mais bon, on arrive à convaincre un güs du port de nous accompagner et de parler avec quelqu’un du bateau…
Ça pourrait le faire, il faut remonter au bâtiment des douanes pour voir (quoi ?) avec eux.
Bon, on remonte les longs escaliers qui mènent au bâtiment flambant neuf, mais désert (normal, plus de trafic passager depuis 2011, lorsque 13 marins chinois ont été tués par des pirates… oui, c’est par là que transite/transitait la drogue entre le Triangle d’Or Thaïlande/Birmanie/Chine/Laos). Donc nous rencontrons trois officiers de l’immigration… dont un qui parle anglais ! youhou !!! Ils vont bien nous aider, appeler le capitaine du bateau qui part prochainement – ahhhh, mais il va vous falloir attendre jusqu’à 16h00 peut être plus tard… – SUPER !! (nous qui pensions partir dans quelques jours seulement !), et vont même négocier le prix pour nous. 800 RMB à deux (soit une centaine d’euro) ouahhhhhh deux fois moins que ce à quoi nous nous attendions et un poil moins cher (et plus pratique) que le passage « par la route » à travers le Laos.
Bon… problème : on n’a pas assez de yuan, et la seule banque du coin n’accepte ni les VISA ni les Mastercard… Mais, comme on est un peu organisés, on a encore des dollars et des euros… On cherche alors à savoir si la banque peut nous les changer, peine perdue… mais la banquière nous accompagne à l’autre bout de la ville – soit 2minutes de marche – chez un commerçant. Mais on a de trop grosses coupures, ça ne l’intéresse pas de changer nos 100 $….
Rhaaaa !! On y est, on est en face d’un bateau qui peut nous emmener en Thaïlande, pour un bon prix… et nous on a des sous, mais on peut pas le payer !
On en profite pour se faire une dernière petite Pijiu (bière) sur le sol Chinois.
On retourne à la douane, un peu fâchés… pas de problème ! Ils rappellent le capitaine : ok pour le payer à moitié en RMB et dollars. Parfait.
On redescend les escaliers, et on embarque sur le bateau (en grimpant sur une petite planche en bois…) on ne connait pas les gens, on ne sait pas qui est le capitaine, mais on nous installe dans une cabine toute propre, sur un bateau bien plus nickel que ce que nous pensions !… et on attend… on attend et on regarde les « fourmis » transborder la cargaison de cartons (de noix !) du bateau auquel nous sommes amarrés dans une rangée de camion garés « à cul » de celui-ci.
On attend de faire viser nos passeports.
Vers 18h30, c’est l’heure du repas, pris sur le pont, avec notre équipe de voyage (6 personnes). Et 10 min plus tard, le capitaine se dévoile enfin ! Et nous emmène avec lui revoir les douaniers pour tamponner notre passeport !
Ça y est ! Les formalités sont faites en 3 min, un joli tampon de sortie de Chine est apposé, et on remonte sur notre cargo… direction la Thaïlande ! On ne sait pas quand on va y arriver… mais on y va !
Après 20 min de navigation, éclairé par deux gros projecteurs (le Mekong n’est pas bien large, et il y a beaucoup de courant), on ralentit et on s’approche de la rive. Mais qu’est-ce qu’ils font… ? on récupère un truc caché ? pourquoi on est là ?… On n’est pas très rassurés d’autant plus qu’on ne nous dit rien.
Finalement, on comprend qu’on est en train de s’arrimer, là, au milieu de la forêt vierge, coincé entre la Chine et le Myanmar, pour y passer la nuit.
Dehors, le bruit des animaux est assez impressionnant, la lune se lève, et après une bonne douche, le bateau s’endort… Sur ses dures couchettes.
Réveillés par le démarrage tonitruant du moteur vers 7h, on émerge doucement, contemplant, depuis notre lit, cette jungle tropicale que nous traversons.
Le capitaine est un as, le bateau dérive dans tous les sens, entre les rochers, et avec le fort courant.
Petit déj’ nouilles, et sieste, lecture, observation du Mekong, des rives laotiennes (on a quitté la Chine) et birmanes, les bateaux de transports, les villages, … tout ça en tongs sur le pont.
On a du mal à se dire qu’on est en « croisière sur le Mékong ».
Vers midi, repas avec l’équipage et puis hop hop hop, chacun retourne à ses occupations, c’est-à-dire lecture, sieste et soleil pour nous ! Dure croisière !
On s’arrête en cours de route pour livrer plein de trucs aux militaires laotiens (planches, boîtes en plastique, armoire métallique, abattant de toilettes (?), ramettes de papier (?), barbelés, …
Et puis on fait le plein de gasoil, là aussi amarré à un bateau laotien et enfin, on décharge deux grosses machines pour des laotiens encore.
Ça devait ne durer que quelques minutes, mais les trois types du port s’avèreront complètement incompétents en maniement de grue… ce qui prendra beaucoup beaucoup plus de temps que prévu.
On est à quai. Au Laos. Mais interdiction d’y poser un pied. On reste donc sur notre bateau, sur le Mekong, et on attend la suite.
Comme on ne comprend pas tout, on ne sait pas si on dort là, ou si on finit la croisière. La Thaïlande n’est qu’à 10km… mais bon, on se laisse porter.
Finalement, le mec à la grue arrive enfin à décharger, la nuit est tombée et le repas sur le bateau est prêt. On s’installe, moteur coupé, tous autour de la table. Petit baijiu entre amis.
Au bout du compte, on dormira sur le quai du Laos… En face, c’est toujours le Myanmar, et là, juste quelques km plus bas, la Thaïlande…
Réveil matinal, ça y est, on part !
En fait, non, on traverse juste le Mékong pour aller faire on-ne-sait-pas-quoi côté birman.
Petit dej’ nouilles sur le pont, et on range nos affaires.
Sur les rives, on aperçoit des gros bouddhas et pagodes dorés ! Le bateau ralenti et on accoste.
On pose un pied en Thaïlande, on y est !
40h et 264 km sur le Mekong à bord d’un cargo transportant des graines de tournesols !
On est trop contents, trop fiers, trop tout !
Le capitaine nous accompagne au poste de douane. On passe par le jardin en friche d’une maison jouxtant le tout petit port de Sop Ruak. On croise 3 poules thaï, et on monte sur le trottoir pour remonter la rue 200m. Marrant, on arrive du « mauvais côté » de la douane.
La douanière n’est pas hyper sympa, mais ses comparses le sont et surtout après plusieurs mois sans que personne ne parle vraiment anglais, l’un d’eux nous demande do you speak english ? on reste interloqués : trop facile !
On remplit le petit papier, et hop, un joli tampon bi-colore, c’est parti pour 30 jours !
Le capitaine nous conduit à 15min en voiture jusqu’à Chiang Saen, la « vraie ville ».
Il est 8h30, bonjour la Thaïlande !!
Ni hao! Ni hao ma? 😀
Salut les amis, toujours aussi passionnant de vous lire… vous avez l’air d’avoir bien chaud alors qu’ici (là où vous êtes pas passés 😛 ) il fait -15°C sans parler du vent.
Je suis content de voir que vous vous portez bien.
Encore merci pour ces magnifiques photos… continuez à bien profiter! Gros bisous (from Galina too 😀 )
Mieux que « la croisière s’amuse »……
Alors là, baba le Bernard
Ca donne trop envi. Brice tu t’es coupe les cheveux? Attention croisiere c’est un truc de touriste…
Marrant, en regardant la photo, vous avez littéralement pris une bière sur le sol chinois 🙂
Brice, t’as essayé de parler mécanique au mécano ?
Bah ouais!
Il m’a dit avoir un problème avec le turbo d’un des moteurs diesel (400cv chacun). Il a chargé le nouveau à Guanlei, mais on a pas pris le temps de le changer ensemble.
Ouaaaaah, ça a pas changé depuis Apocalypse Now.
périlleuse la descente du mékong le barreur doit être bien couplé avec son collègue à la machine surtout que ça doit aller très vite et priorité à la descente j’espère
vous vous débrouillez comme des vieux routards et j’espère que vous aurez des sous pour aller au delà de vos prévisions que ça ne s’arrête pas si vite…
En effet, le courant était rapide et pas du tout homogène, et il fallait aller plus vite que le courant pour manœuvrer, c’est pas si simple d’être marin d’eau douce!
Trop cool ce voyage!
au début du post, on se dit « paye ta galère » juste pour faire quelques dizaines de km. Puis en vous voyant tranquillou sur le bateau, faut bien que vous rencontriez quelques contrariétés.
Elles ont l’air assez efficaces les fourmis humaines pour décharger le cargo.
Et le capitaine, il « drifte » sur le Mékong façon NFS… il est trop fort
Finalement, vous n’allez pas en Birmanie ? vous vous posez en Thaïlande d’abord ?
D’abord la Thaïlande, ensuite le Myanmar !
Trop Cool la croisière !!!
Un de mes postes préférés depuis le début en termes d’aventure 🙂
Brick’s, même pas un pti commentaire sur le 16 cylindres en V du bateau ? t’es plus gadzart ou quoi ?
Bah si !!!
J’ai répondu à Jérôme!
Récit très intéressant. J’avais envisagé de remonter le Mékong jusqu’à Jinghong il y a deux ans, mais vu les difficultés pour trouver les bonnes informations, j’avais renoncé. Vous l’avez fait, en sens inverse: bravo. Après coup je regrette de ne pas avoir davantage essayé…