Un café au comptoir*

[Info pour ceux qui sont perdus : nous avons séjourné à Puducherry du 2 au 4 Mars derniers. Plus d’info sur la carte à ce lien]

C’est ainsi que nous quittons le paisible et tranquille village de Mamallapuram pour Puducherry, situé à une centaine de kilomètres au Sud.


Assis dans notre bruyant bus – mais pourquoi installent-ils le klaxon dans le bus et pas à l’extérieur ? mais comment font ces chauffeurs pour supporter ce son strident ? nous longeons la côte, traversant la plaine monotone et le paysage aride du delta du fleuve Kaveri.
L’ambiance campagnarde est charmante, et nous sommes déposés deux heures plus tard dans la tumultueuse gare centrale de Puducherry, manquant de nous faire renverser par des bus fous à l’inertie pachydermique.

En remontant à pied la grande avenue pour rejoindre notre auberge, nous prenons conscience de la taille de la ville. En effet, bordée par le golfe du Bengale, et située sur la côte de Coromandel, Puducherry (ainsi rebaptisée en 2006 pour prendre une consonnance tamoule) est une petite ville de 250000 habitants, aux rues presque calmes. L’ambiance semble plus sereine que ce à quoi nous nous attendions.

Nous posons nos affaires chez notre hôte et partons nous promener.

Pondichéry évoque les possessions coloniales passées de l’Inde française.
Le territoire, et ses dépendances**, furent français de 1673 à 1954.
Le nom de cette ville renvoie à un imaginaire exotique et lointain, de commerce de tissus et d’épices avec le sous-continent. Il rappelle les grandes expéditions, et les guerres de territoires avec les Anglais, les Hollandais et les Portugais.

La ville possède un riche patrimoine historique, lié aux passages et séjours des différentes pays occidentaux, qui ont laissé derrière eux une planification urbaine au carré, des bâtiments coloniaux, et une langue.

Nous nous attendions à découvrir une ville-musée où l’influence française ne serait plus qu’utilisée par l’industrie touristique. Un peu dans la même veine qu’à Macao, où le portugais s’affiche en parallèle du cantonnais en tant que langue officielle, alors qu’il n’y a eu aucune perméabilité de la culture lusitanienne avec les locaux.
Nous sommes ainsi surpris de voir que la présence française dépasse ces considérations.
Bien entendu, l’ancien comptoir colonial a été administrativement rétrocédé à la suite d’un conflit compliqué avec la jeune Union Indienne en 1954, mais on note encore une importante présence française, à travers le consulat, l’école et l’institut français, mais aussi une diaspora importante (notamment dans la communauté toute proche d’Auroville) – compte tenu de la taille ridicule de cette ville. Le français est toujours parlé par les anciens (il est d’ailleurs drôle de nous faire interpeller par quelques papys, contents de pratiquer leurs indian-french avec nous, sorte de français-créole) et nombre d’entre eux sont toujours citoyens français (ils sont donc détenteurs d’un visa spécial – il y aurait, aujourd’hui, plus de 10000 français à Pondichéry).
De plus, Puducherry jouit d’un statut administratif particulier, et fait partie des territoires les plus riches d’Inde et où les indices de développement sont les plus hauts du pays.

La ville est divisée en trois partie.
La partie moderne. Peu intéressante, bruyante et chaotique… une ville indienne en somme.
La vieille ville au plan en damier (héritage du passage des Hollandais), elle-même séparée en deux. La ville noire et la ville blanche.
La ville blanche est la plus touristique. Elle jouxte le rivage au relief accidenté.
On y trouve les plus beaux bâtiments, anciens hôtels particuliers, les églises ou les anciennes branches des compagnies françaises installées dans le comptoir. Nous y découvrons aussi des magasins chics que seules les grandes métropoles accueilleraient autrement. Les façades sont ravalées. Les rues sont propres, plantées de bougainvilliers aux fleurs radieuses. Des policiers au képi de gendarme élimé veillent à ce que personne n’utilise son klaxon ou ne se gare n’importe où. Les pèlerins (ou badauds que nous sommes) se pressent pour voir l’Ashram Sri Aurobindo – celui dont dépend la ville utopique d’Auroville, non loin. Des échoppes vendent produits de bien-être, huiles essentielles, et articles bio. Des poussepousses conduisent les touristes à travers les rues tranquilles.







C’est calme. Un peu trop même.
À la limite du décor de cinéma.
Ce vide, notamment à certaines heures de la journée, contraste avec l’agitation qui règne en dehors des murs du territoire.
Mais le rythme et l’atmosphère de ces ruelles arborées nous invitent à ralentir les pas, et nous procure un havre de quiétude salutaire quand nous sommes dépassés par le bouillonnement de la ville noire.

Cette dernière demeure néanmoins notre favorite.
Un parfait mélange des genres entre une cité indienne vivante, sa succession d’échoppes bariolées et sa population vibrante, et la relative propreté, les rues calmes, les beaux bâtiments d’habitations de la ville blanche.

C’est surtout ce damier de rues et avenues que nous arpentons, à l’ombre des arbres. Les vieilles façades rafraichies de couleurs pastel, les triporteurs aux formes anguleuses chargés d’une quinzaine de personnes et qui sillonnent la ville et la population bigarée.




Et tous les délices qu’une ville habituée aux touristes occidentaux peut offrir. Des produits exotiques (nous bavons devant la vitrine d’une boulangerie/pâtisserie) mais aussi des mets locaux de meilleures qualités.
Nous avons nos habitudes chez Tiffin&Coffee, restaurant-café*** très propre, où Brice y sera gratifié d’une succulente dosa au chocolat à tremper dans du lait chaud (un ovni culinaire !).

Nous profitons du confort et du luxe que cette ville offre pour parfaire notre garde-robe et acheter quelques jolis habits en prévision de notre passage en France, alors prévu fin Avril****. Brice s’offre une paire de sandales faites sur mesure pour quelques euros et Marion fait réparer intégralement ses nu-pieds pour quelques dizaines de centimes.

Les gens sont sympas.
Nous nous attendions à une ville purement touristique, où la détaxe d’alcool attirerait les touristes locaux du Tamil Nadu dans l’enclave. C’est, en fin de compte, une ville au tourisme « romantique », en décalage avec le reste du pays. Nous avions un sentiment mitigé avant d’y arriver et nous avons été agréablement surpris.
Il n’y a finalement pas tant à voir à Pondichéry. Ce court séjour est parfait. L’ambiance y est bonne. On comprend pourquoi tant d’étrangers s’y plaisent et s’y installent.
La prochaine fois, nous prendrons le temps de découvrir Auroville.

Mais le fait est que nous « avons rendez-vous ».
Dans 4 jours, nous retrouvons nos copains au cœur du Tamil Nadu.
On a hâte !

 

 

‘* Merci Jean pour ce très bon jeu de mot!

** Quelques cinq territoires disparates relevaient de l’administration de l’Empire colonial français des Indes et parsemaient la côte indienne de Calcutta jusqu’au Malabar.

*** L’Inde méridionale affectionne la consommation de café, préparé de la même manière que le thé.
Un concentré de café est versé dans un verre (avec ou sans sucre) et on complète avec du lait chaud.
On ressent aussi que les gens sont mieux éduqués. Les rues comme les échoppes sont plus propres, on trouve plus de savon dans les buibui, plus de langue anglaise aussi. Nous pouvons même avoir une bonne conversation en anglais avec le cordonnier.

**** Nous avions prévu de faire un passage en Europe au cours des mois de Mai et Juin.
Une fois n’est pas coutume, nous avions même acheté nos billets en avance alors que nous étions chez Charles et Maneyika, profitant d’une super offre d’un vol direct Delhi-Paris par Air India.
… Pas de bol, la pandémie du covid19 est passée par là et notre billet a été annulé par la compagnie – toujours pas de nouvelle de remboursement pour l’instant – la bonne affaire !!

12 thoughts on “Un café au comptoir*

  1. Quelle jolie petite ville, c’est une belle visite que j’aurai aimé faire avec vous…
    Et toujours cette merveilleuse cuisine si appétissante et réjouissante …
    Quelle chance vous avez de voir, au hasard de vos circuits, des villes, des villages et paysages si disparates et néanmoins intéressants !

  2. C’est très joli toutes ces couleurs sur les façades des maisons. Je ne connais pas plus la Nouvelle Orléans que Puducherry, mais dans mon imaginaire, y’a quelques ressemblances avec vos photos.

  3. Coucou les amis !
    J’avais beaucoup entendu parler de Pondichéry, notamment de mes parents qui y sont allés 🙂 et ce post conforte mon idée que ça sera pour moi une halte obligée quand on visitera cette partie de l’inde.

    Très jolie petite bourgade 😉 Par contre la zone blanche me paraît un peu trop propre et bien rangée…. j’préfère quand c’est un pti peu plus moins calme….
    Ha ces touristes, jamais contents….

    Gros biosus

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